François Corneloup – Chronique discographique

François Corneloup est un saxophoniste (essentiellement baryton et soprano) de jazz français né le 14 janvier 1963. Autodidacte, il débute dans les années 1980 et 90, notamment au sein de stages animés par le clarinettiste Louis Sclavis au festival de La Roche Jagu en 81 82 83, et en enchainant les expériences et les rencontres, notamment en collectif avec la compagnie Lubat. Ses premières apparitions discographiques se font en duo avec le clarinettiste Sylvain Kassap (Deux en 1997 et Pointe noire en 1993 sur le label Evidence).

A écouter playlist N° 01 : Mademoiselle Terry Au Zoo Part. Duo Kassap – Corneloup / Pointe Noire (1993 – Label Evidence) –

Il sort un premier album en sous son nom peu de temps après, Francois Corneloup Quartet « Frégoli », avec François Raulin au piano, Rémi Chaudagne à la basse et Manuel Denizet à la batterie. Il est alors aux saxophones soprano et baryton et alto. Il abandonnera l’alto rapidement après, et délaissera le soprano quelques années avant d’y revenir dans les années 2000.

A écouter playlist N° 02  : Paso – François Corneloup Quartet « Frégoli » avec François Raulin (pn), Remi Chaudagne (bs), Manuel Denizet (batt). (1994 – Label Evidence)

Le festival de la Roche Jagu, lieu de rencontre et de découverte du jazz pour Corneloup était organisé par un contrebassiste français, Henri Texier. De ce moment date un compagnonnage évident entre le saxophoniste et le contrebassiste, du Sonjal septet de 1995 (qui réunissait tous les « espoirs » du jazz français d’alors – Corneloup, Lourau, Texier fils, Akchoté, Bojan Z) au « So I sing in my dreams » de Corneloup, projet sur la musique de Texier au festival du Mans en 2014. Le saxophoniste sera de presque toutes les aventures du contrebassiste (Sonjal Quintet, Strada Sextet, septet, Hope Quartet etc…).

A lire à ce sujet,  l’interview de François Corneloup sur Citizen Jazz

Il obtient véritablement une reconnaissance en 1998 avec la parution de son album Jardins Ouvriers en trio avec Claude Tchamitchian à la contrebasse et Éric Échampard à la batterie. Cette rythmique sera d’ailleurs l’une des plus courue du jazz français a cette époque, et sera aussi notamment à la base du renouveau du pianiste Andy Elmer dans la deuxième partie des années 2000. Il est depuis cette époque considéré comme un musicien majeur de la scène française et européenne. Ce trio marquera réellement la scène du jazz français de la fin des années 1990, et enregistrera un deuxième opus Cadran Lunaire en 1999.

A écouter playlist N° 03 & 04 : Jiri + Trèves. François Corneloup Trio – Jardins Ouvriers, avec Claude Tchamitchian (cb) & Eric Echampard (batt). (1997 – Label Evidence)

Trèves figure d’ailleurs déjà dans l’album Fregoli, et dans un traitement relativement différent. Il est intéressant de voir ce qu’en fait Corneloup en deuxième lecture avec ce trio.

Après avoir énormément tourné avec ce trio, François Corneloup continue à l’aube des années 2000 avec un nouveau groupe, sans basse, composé toujours d’Eric Echampard à la batterie, Marc Ducret à la guitare et Yves Robert au trombone.

Extrait d’une interview dans Jazz Magazine de Février 2004, par Jean-Jacques Plasseraud.

François Corneloup : J’ai dissous mon trio avec Échampard et Tchamitchian il y a deux ans parce que la musique que je voulais faire alors était irréalisable avec ce groupe. Nous avons commencé de jouer, Yves Robert, Marc Ducret et moi, sans batterie, puis Éric nous a rejoints. On a fait quelques concerts et une tournée en Finlande l’année dernière avant d’enregistrer Pidgin, live en studio. Avec ce quartette, j’ai d’emblée eu envie de mettre de côté l’aspect soliste-mélodiste de mon jeu pour devenir davantage « bassiste ». J’aime l’idée d’être au cœur des structures, dedans plutôt que dessus, et avec le baryton, c’est facile. C’est un instrument idéal pour ça et puis, quand tu as envie d’émerger, ses possibilités lyriques te le permettent sans problème – ce n’est pas par hasard que j’ai choisi d’en jouer. En revanche, je serais incapable de dire pourquoi je me suis mis au soprano…

Jazz Magazine : Pidgin semble être l’accomplissement, sinon la suite logique des Jardins ouvriers et Cadran lunaire…
François Corneloup : Jardins ouvriers est le premier disque où j’ai posé de manière tangible ce qu’est mon univers musical. Cadran lunaire était plus en demi-teinte, intime et nocturne – du coup, il est passé presque inaperçu… Le lien entre ces trois disques pourrait être Échampard. C’est un musicien très indépendant, à qui on ne peut pas faire jouer tout ce qu’on veut. Il a sa vision des choses, et sa traduction sur l’instrument. Idem pour Ducret et Robert : ils ont des univers très singuliers. Marc, c’est la précision, l’ajustement. Tout part de là, des doigts. Yves a un côté « stratège », il observe d’abord le terrain et se positionne en fonction de ce qu’il voit. Moi, je suis plutôt du côté de l’érosion, je vais chercher à l’intérieur de la matière musicale des ressources, ce qu’il y aurait à développer. Je l’use jusqu’à obtenir autre chose. À quatre, nous essayons ainsi de créer de la circulation et des ruptures pour tendre vers une improvisation collective. Le solo peut être un moyen d’y arriver si sa fonction est de faire jouer l’orchestre – si tu improvises pour raconter ta vie pendant que les autres sont au charbon, ce n’est pas intéressant… Dave Liebman est le genre de mec qui sait justement faire jouer son orchestre, il pousse tellement loin ses chorus qu’il l’emmène avec lui. C’est comme un concerto, et à ce moment précis, la musique devient pour moi vraiment émouvante.

A écouter playlist N° 05 : Tell. Corneloup Quartet « Pidgin », avec Eric Echampard (batt), Marc Ducret (gtr), Yves Robert (trb). (2003 – Label Evidence)

le titre Tell est vraiment évocateur de ce que François Corneloup va continuer a creuser avec son nouveau trio u.l.m (ultra léger musical), cette fois ci toujours avec le guitariste Marc Ducret, mais avec un nouveau venu,  le batteur anglais Martin France. Changement de label également puisque le disque sort chez In Circum Girum en 2007. Il en parle en ces termes dans une interview donnée au bloggeur Armel Bloch. ( à dans son intégralité lire ici )

Dans vos projets en trio (Eric Echampard et Claude Tchamitchian puis Marc Ducret et Martin France avec ULM) ou en quartet (Eric Echampard, Marc Ducret, Yves Robert), quelles étaient vos intentions ? Peut-on dire que chaque projet représentait une orientation nouvelle, ou bien s’inscrivaient-ils dans la continuité en allant dans le sens de l’approfondissement ? En quoi le trio ULM était-il différent de vos projets précédents

> Le trio avec Eric Echampard et Claude Tchamitchian est né d’une rencontre d’amitié. On avait la même conception de la musique et du plaisir de jouer avec une sensation très instinctive, en laissant parler l’énergie de façon naturelle. Dans mon deuxième quartet, je me suis davantage préoccupé de la forme, de la composition. J’ai essayé de donner plus de poésie, plus d’air, avec le tromboniste Yves Robert tout en menant un travail structurel et rythmique important avec le guitariste Marc Ducret. Pour le trio ULM je me suis concentré sur des orientations rythmiques beaucoup plus précises avec le batteur anglais Martin France, qui réalise un travail très fin et véloce, avec un découpage souple et très précis. Il est très agréable de travailler avec Marc Ducret car il défend de manière rigoureuse un univers et un langage très personnels, ce qui ne l’empêche pas de s’intéresser à ce que font les autres et d’envisager toujours son travail dans un esprit de coopération. Le terme Ultra Léger Musical ne désignait pas le contenu du disque mais la formule de cet orchestre à la structure légère, qui peut développer une certaine puissance de jeu. J’ai cherché avec ULM à montrer que l’énergie pouvait aussi être apportée par la dynamique et la précision et non pas seulement par la puissance et la force. Par ce projet, je percevais la musique davantage comme un signal. Je vois plus la succession de ces projets comme une continuité que comme une nouvelle orientation. ULM s’est arrêté car Marc était très pris par d’autres projets ; de plus, et il est maintenant installé au Danemark. Avec ce trio, je me suis aperçu que certaines choses me manquaient. J’étais trop loin de ce que j’avais envie de faire. Mais je ne désespère pas de retravailler un jour avec ces deux musiciens.

A écouter playlist N° 06 : L’ombre d’un chant, Corneloup u.l.m avec Marc Ducret (gtr) et Martin France (batt) 4’25

Une autre facette de son travail est sa collaboration au groupe Ursus Minor, avec Tony Hymas, Jef Lee Johnson et David King pour un univers beaucoup plus rock, funk, et même rap. (interview a lire dans son intégralité ici)

Ursus Minor, c’est la Petite Ourse. « Quand on regarde une constellation vue de la terre, elle forme un dessin cohérent, alors qu’en réalité toutes les planètes ne sont pas sur le même plan. Ursus Minor c’est ça : la combinaison magique de quatre musiciens qui ont tous des parcours très différents, y compris géographiquement puisque nous sommes répartis entre Londres, Minneapolis, New York et Paris. » Indissociable de la maison nato, Ursus Minor est un groupe à géométrie variable qui navigue entre rap, funk et jazz. Né de la rencontre de Tony Hymas et du producteur Jean Rochard (ils travaillaient ensemble sur The Lonely Bears) avec le saxophoniste François Corneloup, Ursus Minor a donné son premier concert en janvier 2003 au festival Sons d’Hiver. À l’époque, le reste du casting était différent [1], mais tout aussi éclectique. « Le noyau dur est fixe, explique François Corneloup, mais, s’il nous arrive de jouer seuls, souvent plusieurs chanteurs gravitent autour de nous. »

Tony Hymas, connu comme accompagnateur de Jeff Beck mais aussi en tant qu’interprète classique, est aux claviers, François Corneloup au saxophone baryton, Mike Scott, qui a joué avec Prince ou Justin Timberlake, à la guitare, et Stokley Williams, leader de Mint Condition, à la batterie et au chant. Jean Rochard « est le cinquième membre du groupe. Il assiste à tous les concerts, intervient dans l’ordre des morceaux, commente systématiquement. » À cette base s’ajoutent les invités, certains permanents, comme les rappeurs Desdamona et Boots Riley (qui était présent lors du tout premier concert), d’autres moins récurrents, comme les chanteurs Mahmoud El Kati ou Ada Dyer, que l’on a pu entendre cette année à Sons d’Hiver. Leur troisième album, I Won’t Take “But” for an Answer, est sorti en 2010.

 A écouter playlist N° 07 : Le Soldat Range (feat. D’ de Kabal, Spike) Ursus Minor – Zugzwang / avec Tony Hymas : claviers, Jef Lee Johnson : guitare, François Corneloup : sax bar et sop, Dave King : batterie (Label NATO)

A écouter playlist N° 08 : Get on With it (feat. Boot Riley) – Ursus Minor – I Will not take « but » for an answer / avec Tiny Hymas : claviers, Mike Scott, François Corneloup : sax baryton, Stokley Williams : batterie, (Label NATO)

À Minneapolis, lors du festival Minnesota Sur Seine, François Corneloup a présenté un nouveau quintet « Next », avec Dominique Pifarély, Dean Magraw, Anthony Cox et JT Bates.

A écouter playlist N0 09 : Next door, – François Corneloup NEXT / avecFrançois Corneloup (sax bar & sop), Dominique Pifarely (violon), Dean Magraw (gtr), Chico Huff (bs), JT Bates (batt). (Label NATO)

Après Next, Corneloup repart dans une aventure en trio acoustique, en s’associant avec sa complice de toujours , la contrebassiste Hélène Labarrière et la batteur Simon Goubert. Noir Lumière est enregistré en Fébrier 2010 à Langonnet, le violoniste Jacky Molard est à la prise de son.

Parmi ses autres collaborations: le Grand Lousadzak de Claude Tchamitchian, ainsi qu’un travail plus original : ses duos avec le chanteur breton Yann-Fañch Kemener, un compagnonnage également avec le violoniste Dominique Pifarely (Ensemble Dédales, Next, en trio, Duo etc) , également avec la contrebassiste Hélène Labarrière, notamment au sein du quartet de cette dernière avec Hasse Poulsen à la guitare et Christophe Marguet à la batterie.

A écouter playlist N° 10 : La chanson de Craonne, Hélène Labarrière Quartet – Désordres, avec Christophe Marguet (batt), Hasse Poulsen (gtr), Hélène Labarrière (cb), François Corneloup (sax bar). (2013 – Label Evidence)

La continuité du travail avec François Raulin est à noter, depuis le 4tet Frégoli, jusqu’au trio du pianiste avec le contrebassiste Bruno Chevillon, sur un disque qui sort sur le label allemand Hatology « Trois Plans sur la comète ».

A écouter playlist N0 11: L.S Drive, François Raulin Trio, avec François Corneloup et Bruno Chevillon (cb) (2000 – Label Hatology)

Discographie exhaustive.

Discographie du saxophoniste en leader :

  • François Corneloup Trio : Noir lumière (Inna+ – 2010)
  • François Corneloup Quintet : NEXT (Hope Street/Nato – 2008)
  • François Corneloup Trio : U.L.M (In Circum Girum – 2007)
  • François Corneloup Quartet : Pidgin (Evidence – 2006)
  • François Corneloup Trio : Cadran lunaire (Evidence – 2000)
  • François Corneloup Trio : Jardins ouvriers (Evidence – 1998)
  • Duo Kassap/Corneloup : Deux (Evidence – 1997)
  • François Corneloup Quartet : Frégoli (Evidence – 1994)
  • Duo Kassap/Corneloup : Pointe noire (Evidence – 1994)

Autres collaborations du saxophoniste :

  • Guillaume Roy Quartet : Exubérances (Label Le Triton)
  • Ensemble « Dédales « , Dominique Pifarély : Nommer chaque chose à part (Poros éditions), Géographies du temps (Poros éditions)
  • Dominique Pifarély : Peur (Poros édition)
  • Hélène Labarrière Quartet : Les temps changent (Emouvence), Désordre (Innacor)
  • Trio Contet/Chevillon/Corneloup : Nu (In Circum Girum)
  • Claude Tchamitchian & orchestre Grand Lousadzak : Bassma Suite (Emouvance)
  • Gérard Marais Quartet Opéra : Quartet Opéra (Hopi), Mister Cendron (Hopi)
  • Henri Texier Sonjal Septet : Mad Nomad(s) (Label Bleu)
  • Henri Texier Strada Sextet : Vivre (Label Bleu), Alerte à L’eau (Label Bleu)
  • Henri Texier Holy Lola Orchestra : Bande originale du film de Bertrand Tavernier (Label Bleu)
  • Henri Texier Hope 4tet  (Label Bleu)
  • François Raulin Trio : Trois plans sur la Comète (Hatology)
  • Ursus Minor : Zugswang (Nato), Nucular (Nato), Coup de sang (Nato), I will not take but for an answer (Nato)
  • Sam Rivers & Tony Hymas : Eight Day Journal (Nato)
  • Denis Fournier : Belleville (EMP), MAE (La lichère)
  • Hervé Krief Big Band : Live in Paris (BSM)
  • Eric Lareine : Plaisir d’offrir joie de recevoir
  • Alambic Impérial : Live at the petit vélo (EMB), Sinai (EMB)
  • Paris Musette vol. 2 : Swing et Manouche (La Lichère)
  • Youval Micenmacher : Fera Feza (Hopi)
  • Avec N.Akchoté, Ph.Minton, M.Sanders dans la compilation Buenaventura Durruti (Nato)
  • Jacques Higelin : Aux héros de la voltige